Il
y a tout juste cinquante ans, en avril 1965, était créé le Système
d’alerte aux tsunamis dans le Pacifique, sous les auspices de la
Commission océanographique intergouvernementale (COI) de l’UNESCO. Pour
marquer cet anniversaire, une conférence internationale était organisée à
Honolulu, Hawaï (États-Unis) les 20 et 21 avril.
22 mai 1960,
19h11 – Un tremblement de terre d’une magnitude de 9,5 sur l’échelle de
Richter – soit le plus puissant séisme jamais recensé – se produisait au
sud du Chili, provoquant un tsunami qui allait balayer une partie
importante du littoral du pays, s’échelonnant sur plus de 4 000
kilomètres. Des vagues pouvant atteindre jusqu’à 25 mètres s’abattirent
au sud, entre Concepción et les îles Chiloé, les plus proches de
l’épicentre. Quinze heures plus tard, le tsunami, atteignait Hawaï avant
de frapper le Japon et les Philippines. Au total, cette catastrophe fit
plus de 2 000 victimes et occasionna des dégâts estimés à près de 24
millions de dollars de l’époque (soient près de 200 millions de dollars
actuels). L’ampleur de cette catastrophe a été déterminante dans la
prise de conscience de la nécessité d’un système d’alerte dans cette
région qui est la plus exposée aux tsunamis (près de 75 % des tsunamis
meurtriers s’y produisent). En 1965, le Groupe international de
coordination pour le Système d’alerte aux tsunamis dans le Pacifique
voyait le jour sous l’égide de la COI de l’UNESCO (il a été rebaptisé
Groupe intergouvernemental de coordination du Système d’alerte aux
tsunamis et de mitigation dans le Pacifique en 2005). Le Centre d’alerte
aux tsunamis dans le Pacifique, qui est le cœur opérationnel du
dispositif, était également créé. Basé à Hawaï, le centre dépend de
l’Agence américaine d’observation océanique et atmosphérique (NOAA), et
coopère avec le Centre d’alerte aux tsunamis du Pacifique nord-ouest,
basé au Japon pour évaluer la menace en cas de tremblement de terre et
prévenir les pays.
Organisée à la fois par la NOAA, la COI et
l’Union internationale de géodésie et de géophysique (IUGG), la
conférence internationale qui s’est tenue à Honolulu a retracé
l’histoire de ce qui apparaît aujourd’hui un programme scientifique
international exemplaire. Cinquante ans après sa création, le Groupe
intergouvernemental de coordination compte désormais 46 pays membres. Le
dispositif ne se résume pas à un mécanisme d’alerte, il s’emploie aussi
à améliorer la prévention en amont et favoriser le transfert de
technologie. Le Centre d’alerte aux tsunamis dans le Pacifique a un
accès direct à plus de 150 stations sismiques réparties dans le monde
entier qui l’informent lorsque la magnitude d’un séisme dépasse 5,5. Il a
également accès aux données de près de 100 marégraphes et de
tsunamimètres installés dans le Pacifique qui vérifient si un tsunami a
été généré et estiment son ampleur. Ces tsunamimètres ont permis
d’évaluer avec beaucoup plus de précision le risque de tsunami. De fait,
en cas de menace, les pays concernés peuvent être prévenus en l’espace
de cinq à dix minutes. Le système d’alerte a servi de modèle à la
création des trois autres systèmes d’alerte mis en place au lendemain du
tsunami meurtrier survenu en décembre de 2004 afin de couvrir les
régions les plus exposées : l’océan Indien, les Caraïbes et l’Atlantique
du nord-est et la Méditerranée.
Si la réussite est incontestable,
il reste néanmoins des obstacles à surmonter. Atteindre le "dernier
kilomètre" n’est pas le moindre des défis à relever. Car si le mécanisme
d’alerte fonctionne à l’échelle régionale et nationale, il reste à
s’assurer que les populations proches de la source d’un tsunami
réagissent dans un délai très court et que les populations vivant dans
des zones éloignées et isolées soient prévenues à temps des risques de
submersion. Le financement du système est également en question. Car le
maintien en service du dispositif d’alerte a un coût – estimé entre 50
et 80 millions de dollars par an – qui est aussi le prix à payer pour
limiter le nombre de victimes en cas de tsunami.
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International Tsunami Information Centre (ITIC) et Daniel Bisson, Tsunami Hazard Zone |